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Des glaciers artificiels dans l’Himalaya

 

Thèmes: Environnement

La Tribune, 31 juillet 2009

A 74 ans, un ancien employé des services techniques de l’administration du Ladakh, dans le nord de l’Inde, fabrique des glaciers pour irriguer les champs au printemps.

Voir le diaporama associé et l'article Ladakh, l’Himalaya version bouddhiste


Depuis qu’il est retraité, Chhewang Norphel s’est trouvé un nouveau métier dans lequel il rencontre peu de concurrence : fabricant de glaciers. Et à 74 ans, cet ancien employé des services techniques de l’administration du Ladakh n’a jamais autant travaillé... Construire des glaciers n’est pas une marotte qui vous vient du jour au lendemain.

Pendant des années, Chhewang Norphel a observé les difficultés des agriculteurs en manque d’eau au moment crucial des semis de printemps. Et ce, alors que pendant l’hiver l’eau des torrents glaciaires coulait à flots sans être utilisable. C’est ainsi que lui est venue l’idée de fabriquer des glaciers artificiels. « Une idée toute simple », insiste-t-il, en montrant une modeste retenue en béton et quelques murs de pierres sèches qui coupent un lit de torrent — le tout parfaitement dépourvu de glace en cette saison. Nous sommes à 4.400 mètres d’altitude, en haut de l’un des dix glaciers construits au fil des ans par l’ingénieur.

2KM DE LONG

Chhewang Norphel, fabricant de glaciers

« L’idée toute simple » consiste à conserver sous forme de glace l’eau qui coule pour rien pendant l’hiver. Concrètement, cet homme toujours souriant, aux cheveux noirs de jais et qui semble fait d’acier trempé, creuse de petits canaux qui vont chercher l’eau d’un torrent glaciaire et la freinent. L’eau est ensuite envoyée en direction de la vallée, rencontrant sur son chemin une série de murs de retenue qui ralentissent encore son mouvement, au point qu’elle gèle pendant l’hiver.

Un glacier artificiel apparaît alors, qui peut atteindre jusqu’à 2km de long, et 60 à 100 mètres de large. Au printemps, la glace se met à fondre. Les murs de pierres non jointoyées la laissent passer doucement et elle va irriguer les champs, dans la vallée. Le glacier disparaît peu à peu, avant de « renaître » l’hiver suivant.

L’UNE DES BEAUTÉS DU CONCEPT, C’EST QUE LES TECHNIQUES SONT TOUTES SIMPLES.

L’une des beautés du concept, c’est que les techniques sont toutes simples. Le dispositif ne nécessite aucune machine et les travaux sont pour une bonne part réalisables par les paysans concernés. Bien sûr, un certain budget est quand même nécessaire. Pour arriver au glacier que Chhewang Norphel fait visiter, il a fallu construire une route de montagne. C’est l’armée indienne, très présente au Ladakh, zone frontalière avec la Chine et le Pakistan, qui a financé.

Les murets de retenue du glacier artificiel

Chhewang Norphel travaille en permanence à améliorer son concept pour remédier à des problèmes comme les dégâts causés par le froid extrême qui sévit pendant l’hiver. Mais il est formel : son approche, que personne d’autre ne pratique à sa connaissance, pourrait être adoptée « dans de nombreux endroits, partout où l’altitude est élevée et où la température tombe sous les – 15 °C pendant l’hiver ».

PATRICK DE JACQUELOT, AU LADAKH

Encadré

LE LADAKH, UN DÉSERT EN ALTITUDE

Situé dans la chaîne de l’Himalaya, le Ladakh est un ancien royaume bouddhiste, qui fait désormais partie de l’État indien de Jammu-et-Cachemire. Isolé du reste du pays, le territoire s’étend à de très hautes altitudes, 3.500 mètres pour Leh, sa capitale. Bien qu’entourée de montagnes enneigées, la région est un quasi-désert où il ne pleut presque pas. Le Ladakh est donc dépendant des glaciers, qui ne cessent de reculer sous l’effet du réchauffement climatique : la température moyenne a augmenté de 1 °C sur les trente-cinq dernières années.

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