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En Inde, le poids des castes pèse sur le scrutin

 

Thèmes: Politique - Société

La Tribune, 13 mai 2009

APPELÉS AUX URNES POUR L’ULTIME JOURNÉE DE VOTE, les Indiens choisissent leur candidat sur sa caste, et non pas sur son programme.

PAR PATRICK DE JACQUELOT, à New Delhi

Voir le diaporama sur les parcs de statues de Mayawati


Pour Ram Chander, tailleur intouchable des environs de Lucknow, dans l’État de l’Uttar Pradesh, la question ne se pose pas : il ne peut voter que pour le parti des dalits (intouchables) de Mayawati. Et cela même si son gouvernement n’a pas fait grand-chose pour améliorer sa vie quotidienne. « Je suis brahmane. Si je me présente aux élections, c’est cela qui comptera aux yeux des électeurs, bien plus que de savoir si je suis compétent ou honnête », affirme de son côté un militant pro-démocratie de Delhi.

Plus de soixante ans après l’indépendance de l’Inde et l’instauration d’une république en principe égalitaire, le système des castes pèse plus que jamais sur la vie politique.

CATÉGORIES RIGIDES

Composante essentielle de la religion hindoue, le système des castes répartit la
société en catégories rigides : quels que soient le parcours ou les mérites personnels d’un individu, il ne sortira jamais de la caste dans laquelle il est né. Et dans l’Inde d’aujourd’hui, les brahmanes, la caste supérieure, celle des prêtres, continuent à détenir de très nombreux leviers de pouvoir. Les dalits, en bas de l’échelle, demeurent défavorisés, qu’il s’agisse d’éducation, d’alimentation ou de niveau de vie.

La république indienne n’a pas interdit le principe même des castes, mais les discriminations basées sur ces dernières. Concrètement, l’État a élaboré au fil des années toutes sortes de mesures de discrimination positive en faveur des basses castes. Une proportion souvent importante des places est réservée aux dalits dans l’éducation ainsi que dans les emplois de l’administration et du secteur public. Mais le dispositif n’a pas porté pleinement ses fruits. Mis en place à l’origine pour dix ans, il a été étendu, souligne un universitaire français, selon qu’il y a une fuite en avant pour créer de nouvelles catégories de bénéficiaires. L’hypothèse d’emplois réservés dans les entreprises privées est évoquée.

Ram Chander, inconditionnel de Mayawati

La caste à laquelle on appartient détermine en grande partie la vie privée, le choix des amis et, encore bien plus, celui d’un époux ou d’une épouse. « Le mariage dans la caste, et même dans la sous-caste, demeure la règle », estime un enseignant de Delhi, selon lequel les étudiants « occidentalisés » imposent parfois à leurs parents un mariage d’amour et non pas un mariage arrangé, mais le plus souvent en respectant la caste.

Rien d’étonnant donc à ce que la caste soit également omniprésente dans la vie politique. La « discrimination positive » y figure aussi, avec 15 % des sièges au Parlement réservés aux dalits et 7,5 % aux tribus indigènes. Pour tous les partis, la caste est un élément fondamental de choix d’un candidat pour une circonscription donnée, avec des jeux subtils en fonction de la répartition locale des différentes castes.

Phénomène nouveau, les castes les plus opposées concluent parfois des alliances stratégiques. C’est le cas dans l’Uttar Pradesh où Mayawati n’aurait pu obtenir la majorité absolue au Parlement de l’État sans l’appui apporté par... les brahmanes, qui ont vu dans ce pacte le moyen de conserver une influence sur la marche de l’État... Le résultat des élections devrait être connu ce week-end.

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