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Dossier spécial début des élections 3/3

Partie 1 - Partie 2

Les investissements français en progrès

Les Echos, 7 avril 2014

Les investissements cumulés des grands groupes de l'Hexagone implantés en Inde sont proches de ceux réalisés en Chine.

Patrick de Jacquelot
— Correspondant à New Delhi

« Tenir bon, continuer à y croire » : telle est l'attitude des entreprises françaises présentes en Inde. Même si le contexte politique est difficile et la conjoncture décevante, elles estiment ne pas avoir le choix, certaines que le défi finira par payer.

« C'est beaucoup plus difficile qu'on ne le croyait. » « Notre usine va ouvrir avec deux ans de retard. » « Nous attendons toujours la signature du contrat avec le gouvernement prévue depuis un an. » Des remarques désabusées de ce genre, les hommes d'affaires français en Inde les multiplient en privé. Pour les groupes arrivés au milieu des années 2000, quand la croissance dépassait les 9 %, la déception est certaine. La croissance a chuté et la paralysie administrative les touche de plein fouet. Mais, si bien des responsables confient avoir réduit leurs projets d'investissement, force est de constater que personne ne s'en va, au contraire.

Pour s'en tenir aux derniers mois de 2013, Michelin a ouvert au Tamil Nadu l'une de ses plus grosses usines, une opération à 500 millions d'euros. GDF Suez a consacré plus de 200 millions à l'achat de 74 % d'une centrale thermique. Lactalis a pris le contrôle d'un gros groupe laitier, etc.

Michelin, 500 millions d'euros investis au Tamil Nadu (photo Michelin)


1 milliard d'euros d'investissement

Globalement, les investissements français en Inde se seraient élevés, selon une étude réalisée par les services de l'ambassade de France à Delhi, entre 1,2 et 1,3 milliard d'euros en 2013, troisième année de suite où leur montant tourne autour du milliard. Au total, le stock d'investissements s'établirait aujourd'hui aux environs de 15 milliards d'euros. Les investissements français en Inde seraient donc très proches de ceux réalisés en Chine, évalués à 16,7 milliards d'euros. Ce qui va à rebours du sentiment répandu, selon lequel la Chine attire beaucoup plus que l'Inde.

Deux explications à cela. D'abord, l'Inde est un marché encore très protégé par des droits de douane élevés. « Si l'on veut vendre en Inde, il faut être installé sur place », explique un spécialiste qui cite Pernod Ricard : « Avec des droits sur l'alcool qui peuvent atteindre 160 %, ils exportent très peu ici. En revanche, ils ont une grosse implantation. » Deuxième raison à cette forte présence : le marché indien, avec plus de 1,2 milliard d'habitants, est trop important pour être négligé, au moins par les entreprises du CAC 40 ou les très grosses entreprises de taille intermédiaire, qui ont les moyens d'investir à long terme.

A noter enfin une vraie différence entre les groupes qui vendent aux consommateurs, qui s'en sortent sans trop de difficultés, et ceux qui dépendent de contrats publics et sont frappés directement par l'inaction de l'Etat. Au premier rang de ces derniers on trouve Dassault, Thales et autres Areva, suspendus aux contrats du Rafale ou des centrales nucléaires, pour qui l'issue des élections sera déterminante.

Euphorique, la Bourse parie sur Modi

Bombay est porté par un afflux de capitaux des institutionnels internationaux qui jouent à fond la victoire de Narendra Modi.

Le Bombay Stock Exchange, fasciné par Modi

La Bourse de Bombay a terminé la séance de vendredi en léger repli après… neuf journées de records historiques de suite ! Depuis la mi-février, l'indice phare Sensex du BSE a progressé de plus de 10 % dans un contexte mondial pourtant peu favorable. Une performance entièrement redevable aux institutionnels étrangers qui, au 3 avril, avaient acheté en net pour 4,7 milliards de dollars d'actions indiennes depuis le 1er janvier pendant que leurs homologues indiens en vendaient pour 1,2 milliard, selon les chiffres du broker CLSA.

Divers facteurs contribuent à cet engouement des investisseurs internationaux, dont la perception que l'économie indienne a touché le fond. Victime d'une crise de défiance sévère l'été dernier, elle est depuis entrée sur le chemin du redressement. L'arrivée aux commandes de la banque centrale indienne, RBI, de Raghuram Rajan, a été très bien perçue et la roupie en a elle aussi profité.

Le parti d'opposition favori des marchés

C'est néanmoins l'approche des élections qui est à l'origine du plus clair du mouvement. Depuis plusieurs mois, nombre d'analystes internationaux martèlent le message selon lequel une victoire de Narendra Modi aux élections est probable et sera la clef du redressement de l'Inde. C'est Barclays qui affirme que les sondages favorables au BJP ne peuvent « qu'entretenir un sentiment positif » sur les marchés, CLSA qui souligne que le parti d'opposition « est le favori des marchés boursiers » ou encore Goldman Sachs qui vient de porter l'Inde en catégorie « surpondérer » en raison, entre autres, des élections qui devraient avoir « un impact important sur le progrès des réformes ». Les investisseurs étrangers « parient agressivement sur le fait que les élections vont transformer le paysage pour l'économie indienne qui s'est détériorée ces dernières années », estime Richard Iley, chef économiste pour l'Asie de BNP Paribas, qui ajoute : « Ca laisse beaucoup de place pour des déceptions. »

Le raisonnement des investisseurs comporte en effet deux risques : il n'est pas acquis que M. Modi aura une majorité lui permettant de gouverner à sa guise ni, si tel est le cas, qu'il sera à même d'améliorer rapidement la situation du pays. « Le résultat est beaucoup plus incertain que ce que les gens pensent, affirme Richard Iley, le prochain Premier ministre, quel qu'il soit, risque de diriger une coalition dans laquelle il sera difficile de pousser les réformes. »

« Les institutionnels étrangers font des arbitrages entre pays, analyse de son côté T.N. Ninan, président du quotidien économique « Business Standard » : le Brésil vient d'être dégradé par S&P, la Russie inquiète, ils se reportent vers l'Inde. Mais il arrivera un moment où ils se rendront compte qu'il n'y a pas de solution rapide aux problèmes économiques » du pays.

P. de J.

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